Alors que la Côte d’Ivoire s’avance vers une nouvelle échéance électorale majeure, l’Alliance des Parlementaires Libéraux Africains – Section Côte d’Ivoire (APLA-CI) vient d’officialiser son soutien à une candidature d’Alassane Ouattara pour la présidentielle d’octobre 2025. Un positionnement lourd de sens, qui soulève autant de ferveur dans les rangs du RHDP que d’interrogations dans l’opinion publique.
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Une candidature réclamée au nom de la stabilité
C’est à l’occasion d’un atelier de renforcement des capacités, tenu le 16 juin 2025 au siège du RHDP à Cocody, que l’APLA-CI a dévoilé sa motion. Cette dernière, adoptée à l’unanimité, appelle sans détour Alassane Ouattara à se représenter. Un appel porté par des figures influentes du parti comme le député Famoussa Coulibaly, et soutenu par Sidi Touré, récemment promu vice-président exécutif de l’Internationale Libérale.
Le document salue « le rôle majeur joué par Alassane Ouattara dans la transformation économique, sociale et institutionnelle du pays », dressant un bilan flatteur de ses quatorze années au pouvoir : croissance continue, infrastructures modernisées, stabilité restaurée, accès élargi aux services publics.
Pour l’Alliance, une nouvelle candidature de l’actuel président garantirait « la continuité d’un leadership éclairé », fidèle aux principes libéraux. En toile de fond, un discours de responsabilité : maintenir le cap dans un contexte régional troublé, où plusieurs pays voisins vivent des instabilités politiques ou des coups d’État militaires.
Les non-dits d’un soutien stratégique
Si le soutien affiché par l’APLA-CI s’inscrit dans la logique du parti présidentiel, certains observateurs y voient une manœuvre orchestrée pour légitimer en douceur une nouvelle candidature controversée. Car même si la Constitution ivoirienne ne limite plus expressément le nombre de mandats, la perspective d’un quatrième quinquennat pour Ouattara fait grincer des dents jusque dans les cercles proches du pouvoir.
Ce soutien enthousiaste ne masque pas les défis sous-jacents : une jeunesse désabusée, un climat socio-politique fragile, des tensions communautaires résiduelles et un manque de renouvellement des élites. Pour beaucoup, le RHDP peine à faire émerger une figure alternative crédible, ce qui pousse certains à brandir la carte Ouattara une nouvelle fois.
Autre élément peu abordé : l’usure du pouvoir. À 83 ans en 2025, Alassane Ouattara demeure un homme d’État respecté, mais de nombreux Ivoiriens aspirent à un souffle nouveau. En appelant à sa candidature, l’APLA-CI enterre de facto toute possibilité d’alternance interne immédiate. Un choix qui pourrait accentuer la fracture avec une opposition déjà vent debout contre un nouveau mandat.
Un pari risqué pour le RHDP ?
En proclamant son « engagement total derrière le RHDP et son choix de désigner M. Ouattara comme candidat à l’élection présidentielle de 2025 », l’APLA-CI se veut mobilisatrice. Elle appelle « la jeunesse, les femmes, les leaders d’opinion » à rejoindre la dynamique. Mais cette stratégie, bien que galvanisante pour les militants, n’est pas sans danger.
Le retour d’Alassane Ouattara dans la course pourrait servir de catalyseur à une opposition actuellement morcelée. Des figures comme Laurent Gbagbo, bien que juridiquement empêchées, pourraient instrumentaliser cette décision pour dénoncer un verrouillage du jeu politique. Et même au sein du RHDP, certaines voix s’interrogent sur la pertinence d’un tel choix, préférant miser sur un renouvellement générationnel piloté par le président sortant.
Par ailleurs, la décision finale d’Alassane Ouattara n’a toujours pas été rendue publique. L’homme fort du Plateau se garde bien de commenter ces appels à candidature, préférant probablement jauger la température politique jusqu’au dernier moment. En coulisses, plusieurs scénarios sont envisagés, dont celui d’un retrait en faveur d’un dauphin désigné. Mais tant que l’ambiguïté demeure, le flou alimente les spéculations.
Conclusion : entre continuité et crispations
La déclaration de l’APLA-CI éclaire l’orientation actuelle du RHDP, mais ne répond pas aux questions les plus fondamentales : le pays a-t-il encore besoin de la figure d’Alassane Ouattara pour avancer ? Ou est-il temps d’ouvrir une nouvelle page ? La Présidentielle 2025 s’annonce comme une échéance aussi stratégique que délicate. Une chose est sûre : le choix d’un nouveau mandat ou non, par le président sortant, pèsera lourd dans la suite de l’histoire politique ivoirienne.