7 décembre 2025, 6h du matin. Cotonou dort encore. Dans quelques heures, le Bénin va frôler le basculement. Et l'Afrique de l'Ouest va retenir son souffle.
Acte I : L'Assaut De L'Aube
Camp Guézo, résidence présidentielle. 6h00 GMT.
Les premiers coups de feu déchirent le silence. Des soldats en armes encerclent la maison de Patrice Talon. Ce n'est pas un exercice. C'est une tentative d'assassinat ou d'enlèvement du président de la République.
Simultanément, un autre groupe prend d'assaut la télévision nationale. Les techniciens sont surpris, désarmés. La chaîne passe sous contrôle militaire.
8h00 GMT (9h locale). Huit soldats apparaissent à l'écran. Treillis militaires. Visages graves. Au centre, le lieutenant-colonel Pascal Tigri.
Le message est clair, froid, définitif :
"Le Comité Militaire pour la Refondation a décidé ce qui suit : M. Patrice Talon est démis de ses fonctions de président de la République."
La Constitution est suspendue. Les frontières sont fermées. Les partis politiques interdits.
Les raisons invoquées ? Un cocktail explosif de griefs :
- Dégradation sécuritaire au nord (terrorisme)
- Promotions militaires "injustes"
- Libertés fondamentales "menacées"
- Conditions de vie des militaires dégradées
Le signal de la télévision nationale est coupé. Plus rien. Le black-out.
À ce moment précis, le monde pense : "Le Bénin vient de tomber."
Acte II : Le Bénin Qui Résiste
Mais voilà ce que les putschistes n'avaient pas anticipé.
La grande majorité de l'armée béninoise refuse de les suivre.
Pendant que huit soldats occupent la télévision et qu'un petit groupe tient Camp Guézo, des milliers de militaires restent fidèles à la République.
Le général Abou Issa, chef d'état-major, n'a pas été capturé. Il coordonne la riposte.
La Garde Nationale, unité d'élite, reste loyale et sécurise les points stratégiques.
Patrice Talon est en sécurité. Pas à Camp Guézo. Pas à la présidence. Quelque part dans Cotonou, protégé par ses troupes fidèles.
Les putschistes contrôlent la télé. Mais ils ne contrôlent RIEN d'autre.
Pas le palais présidentiel.
Pas l'armée.
Pas la police.
Pas le pays.
C'est un coup d'État qui rate en temps réel.
Acte III : Le Nigeria Entre En Guerre
10h00 GMT. Abuja, Nigeria. Le président Bola Tinubu reçoit un appel du gouvernement béninois.
"Nous avons besoin d'aide. Maintenant."
Tinubu ne tergiverse pas. Le Bénin est son voisin immédiat. Si le Bénin tombe, le Nigeria est menacé.
L'ordre est donné : frappez.
Des avions de chasse nigérians pénètrent l'espace aérien béninois. Cibles : la télévision nationale et le camp militaire où les putschistes se sont regroupés.
Les bombes tombent sur Cotonou.
Simultanément, des troupes nigérianes franchissent la frontière. Direction : Cotonou. Mission : "déloger les putschistes".
C'est la première fois depuis des décennies que le Nigeria bombarde un pays voisin à la demande de ce pays.
Le message est clair : la CEDEAO ne laissera plus passer les coups d'État.
Acte IV : La Riposte Institutionnelle
11h09 GMT. À la télévision nationale — désormais reprise par les forces loyalistes — Alassane Seidou, ministre de l'Intérieur, apparaît.
Visage grave. Voix ferme.
"Au petit matin, un groupuscule de soldats a engagé une mutinerie dans le but de déstabiliser l'État et ses institutions. Face à cette situation, les forces armées béninoises et leur hiérarchie, fidèles à leur serment, sont restées républicaines. Leur riposte a permis de garder le contrôle de la situation et de faire échec à la manœuvre."
Le coup d'État a été déjoué.
12-13 militaires sont arrêtés. Parmi eux, les auteurs de la tentative.
Mais Pascal Tigri, le cerveau, est en fuite.
Acte V : La CEDEAO Montre Les Dents
Dans l'après-midi, un communiqué tombe d'Abuja, siège de la CEDEAO :
"La Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest ordonne le déploiement immédiat d'éléments de la Force en attente."
Des troupes arrivent du Nigeria, de la Sierra Leone, de la Côte d'Ivoire, du Ghana.
Objectif : "Soutenir le gouvernement et l'armée républicaine du Bénin. Préserver l'ordre constitutionnel."
C'est historique.
Après avoir échoué à intervenir au Niger en 2023, après avoir vu le Mali et le Burkina Faso quitter l'organisation, la CEDEAO vient de sauver un coup d'État en temps réel.
Le message aux putschistes du Sahel : vos jours sont comptés.
Acte VI : Talon Parle Enfin
Patrice Talon apparaît à la télévision nationale. C'est sa première apparition publique depuis les événements du matin.
Costume sombre. Visage calme. Voix posée.
"La situation est totalement sous contrôle. La sécurité et l'ordre public seront maintenus partout sur le territoire national."
Puis, il ajoute une phrase qui glace :
"Des personnes sont retenues par les mutins en fuite. Elles seront retrouvées saines et sauves."
Traduction : Pascal Tigri et ses complices ont pris des otages.
Le putsch a échoué. Mais les putschistes n'ont pas dit leur dernier mot.
Les Questions Qui Brûlent
1. Qui Est Pascal Tigri ?
Lieutenant-colonel. Forces armées béninoises. Radié récemment selon certaines sources.
Aurait-il agi par vengeance ? Par conviction ? Par manipulation extérieure ?
On ne sait pas encore.
Ce qu'on sait : il est en fuite avec des complices. Et ils ont des otages.
2. Pourquoi Maintenant ?
Patrice Talon doit quitter le pouvoir en avril 2026 après deux mandats. Il a déjà annoncé qu'il ne se représenterait pas.
Pourquoi tenter un coup d'État 4 mois avant son départ ?
Hypothèses :
- Peur que son successeur désigné (Romuald Wadagni) ne poursuive les réformes
- Frustration dans l'armée (promotions, conditions de vie)
- Influence extérieure (Burkina Faso ? Niger ? Russie ?)
3. Le Bénin Était-Il Préparé ?
Oui.
Janvier 2025 : Deux associés de Talon condamnés à 20 ans de prison pour avoir "comploté un coup d'État" en 2024.
Talon savait qu'une menace existait. Il a sécurisé l'armée. Renforcé les loyalistes. Préparé les plans de riposte.
Résultat : quand le coup d'État a éclaté, la réponse a été immédiate.
4. Le Rôle Du Nigeria Est-Il Nouveau ?
Oui et non.
Le Nigeria est la puissance régionale. Mais intervenir militairement dans un pays voisin à la demande de ce pays est inédit depuis des décennies.
Ça change la donne.
Les futurs putschistes savent maintenant : si vous tentez un coup au Bénin, au Togo, au Ghana, le Nigeria frappe.
Ce Que Ça Révèle Sur L'Afrique De L'Ouest
1. La CEDEAO N'Est Pas Morte
Après les départs du Mali, Burkina Faso, Niger, beaucoup prédisaient la fin de la CEDEAO.
Faux.
Le Bénin prouve que la CEDEAO peut encore agir vite et fort.
2. Le Nigeria Reprend Le Leadership
Sous Bola Tinubu, le Nigeria affirme sa puissance. Bombardements. Déploiement de troupes. Décisions rapides.
Le message : nous ne laisserons pas l'Afrique de l'Ouest basculer dans le chaos.
3. Les Armées Africaines Ne Sont Plus Unanimes
Dans les années 60-90, un coup d'État réussissait parce que toute l'armée suivait.
Aujourd'hui, les armées sont divisées. Au Bénin, seule une poignée de soldats a tenté le putsch. Le reste est resté loyal.
C'est une évolution majeure.
4. Le Terrorisme Au Nord Reste Le Vrai Problème
Les putschistes ont cité "la dégradation sécuritaire au nord" comme justification.
Ils n'ont pas tort sur le fond.
Le nord du Bénin subit des attaques terroristes régulières. Débordement du chaos du Burkina et du Niger.
Si Talon et son successeur ne règlent pas ce problème, un futur coup d'État aura encore cette excuse.