1. Le fait politique : un candidat sortant, des rivaux disqualifiés
Le président Alassane Ouattara (83 ans) a confirmé sa candidature à un quatrième mandat pour le scrutin d’octobre 2025, après qu’une révision constitutionnelle a supprimé la limite de deux mandats.
Parallèlement, la Commission électorale (CEI) a invalidé plusieurs candidatures majeures :
Laurent Gbagbo (inéligibilité liée à sa condamnation de 2011),
Guillaume Soro (condamné in absentia pour « atteinte à la sûreté »),
Charles Blé Goudé (peine nationale non amnistiée),Tidjane Thiam (impasse sur l’abandon tardif de sa nationalité française).
Cette combinaison laisse Ouattara face à une dizaine de candidats mineurs, sans appareil national comparable.
2. Quelle stratégie cachée ?
En somme, Ouattara échange sa légitimité procédurale contre un contrôle maximal du calendrier politique.
3. Dans quel scénario les exclus pourraient-ils revenir ?
3.1 La voie contentieuse interne (peu probable)
Recours au Conseil constitutionnel dans les 72 heures suivant la décision de la CEI.
Requisite : produire un certificat de non-condamnation (Gbagbo, Soro, Blé Goudé) ou la preuve d’une nationalité ivoirienne exclusive avant la clôture des candidatures (Thiam).
Or les juges constitutionnels sont tous nommés par le président ; chance d’aboutir faible (< 10 %).
3.2 L’amnistie présidentielle (scénario de crise)
Ouattara pourrait signer une loi d’amnistie limitée pour calmer une tension sociale majeure ou répondre à une médiation CEDEAO/UA.
Cela supposerait un risque calculé : faire revenir des rivaux très populaires. Probabilité moyenne si des violences post-validation surviennent.
3.3 La pression internationale concertée (probabilité moyenne-basse)
Suspension d’appui budgétaire UE/USA, menace de sanctions ciblées.
L’effet est incertain : Abidjan compte sur ses partenaires asiatiques (Chine, Inde) et le soutien sécuritaire français.
3.4 Le compromis politique bilatéral
Exemple : autoriser une seule figure majeure (Thiam ou Gbagbo) en échange d’un accord de non-contestation post-électorale.
Nécessite des négociations secrètes et la garantie d’un échec probable au premier tour faute de temps de campagne.
4. Quels risques pour la Côte d’Ivoire ?
Les personnalités exclues restent hautement mobilisatrices : Gbagbo dans le Sud-Ouest, Soro au Centre-Nord, Thiam dans les grandes villes francophones et la diaspora. Leur mise à l’écart peut déplacer la contestation des urnes vers la rue.
5. La victoire la plus risquée ?
En choisissant de briguer un quatrième mandat tout en écartant ses adversaires les plus populaires, Alassane Ouattara réduit l’incertitude électorale mais augmente l’incertitude politique :
Victoire quasi assurée le 12 octobre (scénario à un tour).
Post-élection fragile, tributaire de la capacité du régime à contenir une colère sociale multiforme.
Sauf réintégration surprise de l’un des grands exclus, le scrutin 2025 risque d’être perçu comme un plébiscite contrôlé, pesant sur la stabilité à moyen terme et sur la réputation démocratique d’un pays longtemps présenté comme un modèle de relance post-conflit.